RÉTROSPECTIVE DE L'ANNÉE 2010 : CRISES BIEN GÉRÉES ET DÉMOCRATIE SUR LES RAILS

Le Lun 03 jan 2011 0

Publié par Sahel Dimenche L'année 2010 aura été pour le Niger une année dense en évènements, dont les plus marquants sont le dénouement de la crise institutionnelle et politique, la gestion de la crise alimentaire, les inondations, le referendum constitutionnelle ayant donné naissance à la 7ème République, les perspectives électorales et aussi la percée de notre équipe nationale de football sur le plan continental. Nous vous proposons, ci-après et dans nos prochaines éditions, ces principaux évènements qui ont rythmé quotidiennement notre vie pendant 12 mois, et aussi, par thématique, d'autres faits contributifs au développement de notre Nation. Exit 2010, bonne année 2011 ! Crise et dénouement En début 2010, tous les phares de l'actualité internationale étaient braqués sur le Niger qui venait d'entrer dans sa 6ème République, suite au référendum combien controversé du 4 août 2009. La tenue de ce référendum constitutionnel avait été condamnée par la CEDEAO qui, à l'issue de son sommet du 17 octobre 2009 à Abuja, avait décidé de suspendre le Niger de ses instances pour violation de son protocole additionnel sur la bonne gouvernance et la démocratie. C'est dire que le Niger avait entamé de plain-pied l'année 2010 dans une zone de tourmente, et tel un navire ivre, notre pays tanguait dangereusement sous l'affrontement de deux camps, la CFDR (Convention des Forces Démocratiques pour la République) et le MPRR (Mouvement Populaire pour la Refondation la République), à coups de meetings, de marches et de déclarations incendiaires. Pendant ce temps, plusieurs missions de haut niveau étaient dépêchées un peu partout par le pouvoir en place pour expliquer le bien-fondé du bonus de trois ans que s'était octroyé le Président de la République, de la modification de la constitution de la 5ème République pour lui permettre de se présenter perpétuellement à la présidence, etc.
Des missions étrangères étaient également venues au Niger pour aider les deux camps à trouver un terrain d'entente. Car, en même temps que les contestations fusaient de toutes parts, l'inquiétude s'était installée, chez les Nigériens d'abord, au niveau de la communauté internationale ensuite. Et, malgré les appels au dialogue et au consensus d'une partie de la société civile n'ayant pas pris partie, des pays amis, des organisations régionales, sous régionales et internationales, la situation devenait tendue de jour en jour. C'est dans cette atmosphère de crise, de guéguerre et d'incertitudes que la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) désigna le Général Abdusalami Abubakar comme médiateur du dialogue inter-Nigériens, précisément entre la partie gouvernementale et l'opposition, représentées respectivement par le MPRR et la CFDR. Entamés à Niamey le 21 décembre 2009 pour entendre les parties en présence et discuter avec eux autour d'une même table afin d'aboutir à un consensus, les pourparlers ont dû être suspendus, après une journée de chauds débats. Le médiateur de la CEDEAO repartit comme il est venu, laissant le statut quo ante. En fait, le document de synthèse qu'il avait élaboré n'a fait l'objet d'aucun débat par les parties en présence. La partie gouvernementale s'est contentée de donner un large aperçu sur le processus ayant abouti au référendum, sur la naissance de la 6ème République et ses institutions, tandis que l'argumentaire de la CFDR portait sur la situation sociopolitique du Niger avant le référendum, le référendum lui-même, l'acte additionnel et la décision prise par la CEDEAO le 17 octobre 2009, (....), les élections législatives et municipales, la situation de crise et les perspectives. Le document de synthèse du médiateur, devant constituer la base des négociations, fut donc diversement apprécié par les parties au dialogue. Pour le MPRR, ce document a occulté une partie essentielle de ce qui doit constituer la base des discussions à savoir le débat sur la légalité et la légitimité du référendum du 04 août, de la 6ème République et de ses institutions. La CFDR, elle, s'est dite satisfaite de ce document de synthèse qui, pour elle, constitue ‘'une bonne base de discussions''. Alors que l'opposition affirmait avoir exprimé, dans une correspondance adressée au médiateur, son acceptation du projet d'accord que ce dernier avait soumis aux deux parties, la partie gouvernementale voyait en cela une remise en cause de la constitution du 18 août 2009. Fin de dialogue ! Il ne restait plus, pour le médiateur et l'opposition, qu'à s'en remettre à la décision de la 37ème session du Sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement de la CEDEAO prévu pour se tenir le 16 février 2010 Abuja au Nigeria, et à laquelle le Général Abdusalami allait présenter son rapport. Au lendemain de ce sommet, le 17 février, le Premier ministre nigérien de l'époque, qui y avait assisté en tant qu'invité sur demande du gouvernement nigérien, tenait une conférence de presse dans laquelle il affirmait avoir relevé ‘'de vive voix que dans l'histoire de la CEDEAO, jamais un pays n'a été aussi lourdement et arbitrairement sanctionné'', ainsi que le non fondé du communiqué du 22 décembre 2009 où l'institution sous-régionale estimait que cette date sanctionne la fin légale du mandat du Président de la République. ‘'Cela dénote une erreur de l'institution sous-régionale qui ne doit pas se répéter'', a-t-il déploré, condamnant la médiation qui, selon lui, doit faire l'objet d'un relèvement du niveau, avec plus d'efficacité et moins de médiatisation. Quant au fauteuil présidentiel, il ‘'n'est pas une matière à discussions'', avait-il clairement indiqué, révélant que le lendemain, 18 février, il se tiendra un Conseil des ministres à l'issue duquel d'importantes décisions seront prises. C'est dans ce contexte de crise accentuée, et au lendemain de cette déclaration, alors que se tenait le Conseil des ministres annoncé, que les déflagrations des armes de l'Armée nigérienne venaient mettre fin à la 6ème République née après une gésine des plus tourmentées, puis précocement arrachée à la vie. La 6ème République a vécu! Et les armes se sont tues, les querelles intestines aussi. Le Chef d'Escadron Djibo Salou, (promu par la suite, par ses pairs, Général de Corps d'Armée), nouvel homme fort du Niger, et ses compagnons, organisés en un ‘'Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie'', informent l'opinion nationale et internationale de la situation. Dans un message à la Nation, le Président du CSRD a énuméré les raisons qui ont amené l'Armée nigérienne à cet ‘'ultime recours'' : ‘'refus des anciennes autorités de se soumettre aux arrêts de la Cour constitutionnelle, refus qui constitue en droit nigérien un crime de haute trahison ; la dissolution, sans précédant dans l'histoire, de la Cour constitutionnelle dont les membres sont pourtant inamovibles ; le démantèlement des autres institutions de la République ; le refus de tous les compromis politiques que nos voisins et partenaires, soucieux de la stabilité de notre pays, ont proposés ; les tentatives d'utilisation politique de l'appareil judiciaire et les violations des droits humains notamment par l'emprisonnement et le harcèlement; l'informalisation de l'Etat et les menaces sur la paix sociale ; la détérioration de nos relations avec nos partenaires''. Il faut rappeler que suite à cette action de l'Armée, les frontières terrestres et aériennes ont été fermées et un couvre feu instauré. Ces mesures seront levées le lendemain, 19 février 2010. Ce même 19 février, dans l'après-midi, soit 24 heures seulement après la prise du pouvoir par le Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie (CSRD), les populations de la capitale sortaient dans les rues pour marquer leur adhésion à l'action du CSRD. Ce genre de manifestations fit tâche d'huile, aussi bien à Niamey qu'à l'intérieur du pays. Populations, partis politiques de la CFDR, associations et ONG, tous réclamaient un retour à une vie constitutionnelle normale par l'adoption d'une Constitution consensuelle et l'organisation d'élections générales libres et transparentes, afin que le Niger puisse retrouver la paix intérieure et reprendre sa place dans le concert des Nations. En outre, plusieurs émissaires de pays amis et d'organisations sous-régionales et internationales étaient dépêchés auprès du Président du CSRD pour s'enquérir de la situation et des intentions de la junte. Le Président du CSRD les avait rassurés quant à sa volonté de restaurer la démocratie et au fait que leur action s'inscrit juste dans l'objectif de mettre fin au blocage politique du pays, et surtout que le CSRD n'a pas l'intention de s'éterniser au pouvoir. Mieux, pour assurer une conduite sereine et impartiale de la Transition, le CSRD a pris ‘'l'engagement qu'aucun membre du CSRD ou du gouvernement de Transition ne sera candidat aux prochaines élections présidentielles'' et "qu'aucun haut responsable de la Transition ne pourra prétendre à un mandat électif aux prochaines échéances électorales''. La seule ambition des nouvelles autorités, ont-elles affirmé, c'est la restauration de la Démocratie et de l'Etat de droit ; l'assainissement de la situation politique et économique, en particulier la lutte contre l'impunité, la corruption et les trafics d'influence ; la mise en œuvre urgente de tous moyens pour faire face à la famine qui menaçait l'existence de millions de Nigériens dans pratiquement toutes les régions du pays ; le développement minier et pétrolier du pays dans la rigueur et la transparence. Ces messages ont été ventilés aussi bien à l'intérieur du pays qu'auprès des pays amis et organisations internationales par des missions conduites par plusieurs membres du CSRD. Le Président du Conseil Suprême pour Restauration de la Démocratie a, pour sa part, initié une série de rencontres avec l'ensemble des couches socioprofessionnelles et les partenaires du Niger pour leur faire part des mêmes messages. C'était rassurant et le Niger, qui allait être condamné à vivre en autarcie, put reprendre sa place au sein de la communauté internationale. En effet, outre ces décisions, le CSRD a prouvé sa bonne foi à la face du monde en mettant en place les institutions devant régir la Transition, et fixé un calendrier pour des élections dont l'aboutissement sera la remise du pouvoir aux élus du peuple.
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