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LETTRE OUVERTE AU MEDIATEUR DE LA REPUBLI QUE DU NIGER

Le Mer 25 fév 2015 0

BachiretcheiffouMonsieur le médiateur de la République,

Sans réponse de votre part, je vous renvoie ma lettre cette fois par courrier électronique et voie postale.

J’espère que vous mesurez combien votre rôle est méconnu des nigériens et surtout combien il est attendu ? Nul ne saurait vous apprendre à regarder autour de vous à tous les sujets qui toucheraient à la réalité de notre société.

Mais dans un monde d’incertitudes, où la précarité du lendemain s’ajoute à la précarité du présent, où la force de la loi collective se fracasse sur la violence individuelle, où l’idéal commun meurt sous le poids de l’individualisme, il est plus nécessaire que jamais qu’il y ait un lieu d’écoute et de respect et une recherche permanente d’équité.
Chacun ressent la nécessité de la loi, parce qu’elle protège les plus faibles, mais chacun sait aussi que la stricte application des textes heurte parfois le bons sens. Le Médiateur de la République fonde son action sur cette dernière notion qui consiste « à corriger la loi quand, en raison de son caractère général, elle se révèle insuffisante », comme l’écrivait déjà Aristote.

Il me plait donc de vous rappeler que le rôle du médiateur de la République est de veiller à la participation de tous à la vie civique, à la démocratie et à la paix sociale. C’est dans d’ailleurs l’esprit de la loi n°2011-18 du 08 Août 2011 instituant un Médiateur de la République, modifiée et complétée par la loi n°2013-30 du 17 juin 2013 consacrant son indépendance. De part cette même loi, le médiateur de la république devra lui-même incarner des qualités comme: l’intégrité morale, la compétence et l’expérience en matière économique, politique et sociale.

Tout cela a déjà été longuement exposé par le législateur et j’aurais eu scrupule à y revenir si vos multiples errements, dus à vos activités politique, ne m’incitaient à renouveler le vœu déjà émis par le législateur et que la loi n°2011-18 du 08 Août 2011 et progressivement renforcé par la loi n°2013-30 du 17 juin 2013 est venu exposer.

En effet, notre société vit une contradiction croissante. L’individualisme nous fait exiger de plus en plus de liberté alors que l’intérêt général et l’exigence de solidarité imposent de plus en plus de limites à cette liberté. Cette évolution rend encore plus fragile l’indispensable équilibre entre droits individuels et droits collectifs : on attend de la loi qu’elle exprime l’intérêt général et, dans le même temps, on espère qu’elle répondra à des intérêts particuliers.

Monsieur le médiateur de la République,

Je n’aurais jamais pensé un jour de ma vie être mis dans une situation de vous adresser une seule lettre. Et si aujourd’hui nous en arrivons à ce point, c’est pour vous dire à quel point je suis outré de constater le rôle partial que vous êtes entrain de jouer dans la conduite de votre mission.

Le législateur avait eu une vue précise des pouvoirs du Médiateur de la République, mais il n’a pas aussi manqué de dire ce qu’il ne pouvait pas être. Si le médiateur jouit d’une immunité dans l’exercice de ses fonctions, celui-ci est aussi interdit de tout mandat électif, ce, afin de garantir son indépendance et son impartialité. C’est le sens de l’article 5 de la loi n°2011-18 du 08 Août 2011. Cette dernière avait tenu à préserver le Médiateur de toute subordination à quelque pouvoir que ce soit, en stipulant : « Il ne reçoit d’instruction d’aucune autorité » (art. 1er). Ainsi le législateur avait estimé qu’il était indispensable qu’aux yeux des citoyens le Médiateur apparaisse notamment comme indépendant de l’administration, sous peine d’être considéré comme à la fois juge et partie.

Le Parlement et le Gouvernement ont clairement affiché leur volonté commune : celle qui consiste à faire du Médiateur une institution « à nulle autre pareille », qui fût au confluent des pouvoirs législatif et exécutif tout en s’en distinguant comme de l’autorité judiciaire.

Les dispositions de la loi qui définissent la compétence du Médiateur, organisent son indépendance et prévoient ses moyens d’action, séparent effectivement, sur le plan juridique, l’Institution du Médiateur de la République des divers pouvoirs reconnus par la Constitution.

A ce titre, la loi précise notamment que le Médiateur, qui « ne reçoit d’instruction d’aucune autorité, ne peut être poursuivi, recherché, arrêté ou jugé à l’occasion des opinions qu’il émet ou des actes qu’il accomplit dans l’exercice de ses fonctions », qu’il fait » .. toutes les recommandations qui lui paraissent de nature à régler les difficultés dont il est saisi … et, le cas échéant, toutes propositions tendant à améliorer le fonctionnement de l’organisme concerné », qu’il « peut recommander … toute solution permettant de régler en équité la situation du requérant … suggérer les modifications qu’il lui paraît opportun d’apporter à des textes législatifs et réglementaires … à défaut de l’autorité compétente », qu’il « peut au lieu et place de celle-ci engager contre tout agent responsable une procédure disciplinaire … en cas d’inexécution d’une décision de justice … enjoindre à l’organisme mis en cause de s’y conformer », que « les ministres … sont tenus d’autoriser les agents placés sous leur autorité à répondre aux questions et éventuellement aux convocations du Médiateur », et que « les collaborateurs du Médiateur sont nommés par celui-ci pour la durée de sa mission ».

La création de cette institution a renforcé l’attente des nigériens quant à l’amélioration des services publics. Aujourd’hui encore, beaucoup s’interrogent sur le fonctionnement et l’utilité même de votre institution, au vu de l’état dégradant et pitoyable de notre administration.

Monsieur le médiateur de la République,
Même si l’institution n’est pas prévue par la loi fondamentale, il m’importe de vous rappeler qu’aucun pouvoir ou autorité reconnu par la Constitution ne dispose d’une compétence semblable à celle du Médiateur de la République. Cette situation, résulte de la volonté expresse du législateur de faire du médiateur un organe efficace de promotion de la démocratie, de la paix et de l’équité.

Mais force est de constater que la sphère administrative nigérienne, dont vous avez la charge d’assurer l’équité, a perdu de sa vertu.

Les enjeux déterminants pour notre administration ne trouvent pas de réponse politique à la hauteur. L’impunité et les abus trahissent l’illusion de la loi par le recul des responsabilités individuelles et de la morale publique. Les débats sont minés par les discours de posture et les causes à défendre noyées parmi les calculs électoraux. Les efforts citoyens sont usés par les comportements politiciens. Qu’avez-vous fait pour y palier en tant que garant de l’équité des pouvoirs publics ?

Monsieur le médiateur de la République,
Permettez-moi de vous rappeler que la sphère administrative nigérienne doit être celle de l’éthique, de la transparence pour toutes celles et tous ceux qui exercent le pouvoir, notamment s’agissant des financements et des conflits d’intérêts. L’autorité, pour être acceptée, ne pourra se fonder sur la justification d’un titre ou d’une élection mais reposera sur la dimension morale de celui ou celle qui l’exerce, en construisant un socle de convictions et non bâtir sur le sable des colorations politiques.

Vous devez à ce titre vous garder de mener des activités politiques conformément à l’esprit de l’article 5 de la loi n°2011-18 du 08 Août 2011. En présidant les travaux de votre formation politique le dimanche 04 janvier 2015, vous aviez manqué à votre devoir de neutralité. Car toute activité politique de votre part suppose une perspective électoraliste. Celle-ci aboutit indéniablement à la recherche d’un mandat électif. Pire, vous vous êtes sans vergogne affiché publiquement aux côtés des membres de la mouvance présidentielle en l’occurrence la MRN (dont votre parti est membre et non vous du fait de vos fonctions) pour de déclarations de soutien politique en violation flagrante de votre serment et de la loi de 2011.

Plutôt, que de transgresser allègrement les règles établies, vous ferez mieux de vous investir pour une meilleur prise en charge des contentieux dont vous êtes saisi. Faut-il vous rappeler que depuis votre nomination comme médiateur de la République le 11 Août 2011, un seul rapport a été rendu par vos soins ? Le rapport est sensé être rendu chaque année conformément à la loi de 2011. Le votre dont le corps s’assimile plus à un aveu d’impuissance qu’un rapport d’activité couvre une période de trois (3) ans (2011-2013), méconnaissant des obligations qui vous incombent.

Monsieur le médiateur de la République,

Savez-vous que cette même loi de 2011 instituant la fonction de médiateur que vous incarnez, vous oblige à une neutralité et à un retrait de la vie politique même lorsque vous aurez quitté vos fonctions? Oui le législateur à manifesté son vœu de garder à l’écart des diatribes politiques, le médiateur de la république même après son mandat. En acceptant cette mission vous saviez donc ce a quoi vous vous exposiez. J’ai un moment pensé que c’était pour vous un tremplin à une retraite dorée mais apparemment vous ne semblerez pas vous résignez malgré les dispositions pertinentes de la loi de 2011 complétées par celles de la loi de 2013.

Monsieur le médiateur de la République,
Je vous prie de considérer ces observations non comme une adversité encore moins une remise en cause de votre probité intellectuelle, mais comme une contribution à la réussite de votre mission.
En vous souhaitant mes meilleurs vœux pour l’année 2015, je vous prie de croire en l’expression de ma très haute considération.

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